Pour répondre à cette question, nous vous proposons un extrait du livre à paraître très prochainement de Valérie Vayer, À moi ! Lorsque l’ego paraît : Pour une egologie pratique.

Dans les sociétés de primates, les mères travaillent avec leurs bébés. Nous sommes beaucoup moins évolués, sur ce point, que nos cousins, puisque nous sommes apparemment incapables de concilier nos vies familiales et sociales. Les primates cherchent la nourriture, occupent leurs niches en bonne compagnie sans se séparer de leurs petits – pour qui ce serait probablement fatal. Une mère a d’autres bras avec elle pour materner et porter son bébé, qui ne doit pas rester seul. En éthologie, on appelle les propriétaires des autres bras les « allomères ». Il peut s’agir d’un mâle, dont les comportements agressifs tendent alors à s’inhiber. Nos scientifiques se demandent quel est l’intérêt pour d’autres membres du groupe d’avoir des comportements maternants envers un petit qui n’est pas le leur. Personnellement, en tant que mère qui a dû apprendre sur le tas une fois mon premier bébé né, alors que je n’en avais jamais approché un au quotidien pendant les dizaines d’années précédentes, je le vois tout de suite, l’intérêt ! Je le vois également du point de vue du bébé qui créera des liens avec d’autres personnes, ce qui élargira sa base psycho-affective ; un bébé dont la mère se sentira entourée et en forme : avantage plus qu’évident, clé du bonheur individuel et collectif ! Du point de vue de l’allomère, se familiariser in vivo avec le maternage, du bon, du vrai, du moelleux, du vivant, est porteur pour ses propres expériences à venir : l’intérêt en est absolument évident quand on voit à quel point une jeune mère peut être en état récurrent de panique, son bébé dans les bras, à peu près aussi peu au fait de ce dont il ou elle a besoin qu’une « poule qui a trouvé un couteau ». L’intérêt de comportements maternants sociaux et solidaires dans une économie psychique performante est donc considérable ! D’un point de vue collectif, créer ces liens et les vivre de façon durable est, à mon avis, la condition indispensable à la cohésion d’un groupe social, fondée non sur des obligations et la répression des émotions violentes issues du manque de liens, mais sur un « vivre ensemble », solidaire dans la paix et la créativité engendrées par des émotions heureuses, issues d’un maternage soutenu par un entourage bienveillant et toute la communauté humaine. Quelqu’un ose-t-il encore prétendre qu’avoir une mère et un ego bien portant qui a eu le droit de vivre en fusion n’est pas de l’intérêt de tous ?

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